MESSAGE AUX IVROGNES, ASSASSINS DE LA ROUTE
Avant de prendre la route, et de vous livrer à des actes odieux en picolant comme des trous, lisez ce poème, que j'ai écrit en 1982... J'étais sur le point de quitter les Pompiers, je n'en pouvais plus... Le 23 Décembre 1981, un accident de la route comme hélas, durant mes douze ans de carrière professionnelle j'en ai vu des centaines, brisa la vie d'un jeune garçon d'une dizaine d'années. Victimes d'un alcoolique (2,5 g / 1000, à quatre heures du matin), ses parents furent tués sur le coup ! Prisonnier des tôles, nous avons mis deux heures pour le désincarcérer. Nous l'avons sauvé, mais dans son cœur aujourd'hui, que se passe-t-il ?
Certes, il est permis de boire un peu plus que d'habitude... Certes, la bonne humeur, l'euphorie se doivent d'être au rendez-vous. Mais que par votre inconscience chronique, vous ternissiez l'éclat de cette harmonie, ce n'est pas la prison que vous méritez, mais la peine capitale ! A défaut de civisme, essayez de vous mettre comme je l'ai fait, à la place de ce pauvre petit orphelin, pleurant ses parents à cause d'un alcoolique invétéré... Buvez, saoulez-vous s'il n'y a que cela pour vous donner l'illusion d'être des hommes, mais par pitié, ne prenez pas le volant !!! Vous n'êtes que des loques, des débris de l'humanité, en ne pensant qu'à votre seule passion : picoler ! Si, après avoir lu ce poème, vous versez quelques larmes, alors... laissez la bouteille de côté ; vous permettrez à des innocents, de vivre en paix !
LA VEILLE DE NOËL
J'ai trente ans aujourd'hui et je revois encore
Chaque instant de délire avant le grand départ ;
C'était la première fois nous partions à Andorre
L'euphorie se lisait au fond de mon regard ...
Le soleil était là présent au rendez-vous
Et ses rayons ardents attisaient mon émoi
Echauffant tendrement nos cœurs devenus fous
Battant à l'unisson en étouffant les voix ;
Plus rien aux alentours ne comptait plus pour moi
Que ce ruban gracieux défilant sous nos pieds
Nous étions impatients imaginant déjà
Ce réveillon divin aux mille voluptés ;
La neige avait posé son manteau cristallin
Dont l'éclat merveilleux se mirait dans nos yeux
La route blanche ornée de verdoyants sapins
Etalait devant nous son tapis sinueux ;
Comblé de féeries bercé par les cahots
Je quittais le présent au décor prestigieux
Pour me laisser griser et partir à l'assaut
De rêves enivrants au plus lointain des cieux ...
Sur mon nuage blanc je survolais la terre
Offrant aux malheureux de somptueux cadeaux
Ils découvraient ravis oubliant la misère
Ces dons venus des Dieux miraculeux joyaux ...
Mais le feu de Satan par un cinglant éclair
Traversa sans pitié mon nuage enchanteur ;
Le choc fut si violent que dans un bruit d'enfer
Tout vola en éclat brisant mon petit cœur ...
Quand j'ai ouvert les yeux j'avais encore plus mal
J'étais couché parterre et j'avais vraiment chaud
Les gouttes de sueur sur mon visage pâle
Décrivaient des sillons en me glaçant le dos ;
Je ne comprenais pas ce qui c'était passé
J'appelais mes parents qui ne répondaient pas
J'étais seul dans la nuit je n'osais pas crier
J'avais peur j'avais chaud mon souffle s'arrêta ...
Quelques instants plus tard une vision d'horreur
Me sortit brusquement de mon demi sommeil ;
Les rayons du soleil attisaient ma stupeur
Quand je vis ma sueur couleur rouge vermeil.
Je grelottais de peur quand mes yeux effarés
Rougis par la douleur brouillés par le chagrin
Fixèrent intensément mes parents adorés
Broyés par la folie d'un injuste destin ...
Vingt ans pour oublier cette image cruelle
Qui encore aujourd'hui présente en mon esprit
M'empêche de rêver en ce jour de Noël
A rien d'autre sur terre que mes parents chéris ;
Peut-être bien qu'un jour j'emmènerai mon fils
Passer pour une fois son Noël à Andorre
Lui aussi connaîtra le rêve et ses délices
Sur son nuage blanc qu'il aimera très fort ...
... J'avais presque dix ans et mon cœur tout meurtri
Se souviendra toujours de cet instant cruel
Ayant assassiné avec un grand mépris
Mes parents adorés la Veille de Noël ...
© Richard NATTER. (Grenoble 1982)